Curiosités

Les Possédés de Loudun

L'affaire Urbain Grandier

La formidable histoire d’Urbain Grandier

(Texte librement inspiré des émissions diffusées en 1984 sur Radio Chinon Val de Vienne. Maryvonne Poupard interroge Pierre Delaroche, Président de la Société Historique du Pays Loudunais.)

Urbain Grandier, brillant orateur, séducteur impénitent, volontiers arrogant, devient en 1617 à la stufécation générale, curé de Saint Pierre du Marché à Loudun, avec le titre de chanoine prébendé de la Collégiale Sainte-Croix. Il n’a que 27 ans. Dès son premier sermon, les loudunais sont séduits. Sa finesse lui permet de se mettre aussi bien à la portée des plus humbles que celle des plus instruits. La ville tombe sous son charme. Toutes les portes lui sont ouvertes.

Cette période de grâce ne durera pas. Urbain Grandier est querelleur, provocateur et surtout mène une vie plus que libertine, allant jusqu’à séduire et déshonorer la fille du Procureur du Roi Trincant, qui pour se venger, ourdira à son encontre un complot qui regroupe maris trompés, pères bafoués et tous les ennemis que son orgueil et son tempérament belliqueux ont fini par dresser contre lui. Faisant fi de la menace qui pèse sur lui, il poursuit ses œuvres, commettant des écrits sulfureux pour l’époque ou officiant à la fois comme mari et prêtre lors de son propre mariage.

Il prend également part aux démêlés politiques autour de la destruction du Château de Loudun ordonnée par Louis XIII à laquelle la population loudunaise est farouchement opposée.
Urbain Grandier prend publiquement fait et cause pour sa sauvegarde contre l’aréopage de notables, dont Trincant et nombre de ses ennemis qui militent pour sa destruction. Il va jusqu’à humilier Richelieu lors d’une cérémonie religieuse, s’attirant son inimitié indéfectible.

D’aucuns estiment que le Château de Loudun sera rasé sur ordre de Richelieu par vengeance à l’encontre d’Urbain Grandier.
Urbain Grandier bénéficie de protections haut placées qui lui permettent d’exercer, quelques temps, ses talents d’agitateur, sans grande conséquence. Il est bien incarcéréune fois par ordre de son évéque qui le condamne à quelques peines corporelles, au jeu^n et à la méditation. Eloigné par l’Archevèque avec ordre express de ne pas reparaître dans son diocèse, il n’hésite pas rentrer triomphalement à Loudun.

Son destin est dès lors scellé. Un autre personnage entre en scène. Sœur Jeanne des Anges, Supérieure du Couvent des Ursulines et Directrice d’un pensionnat dejeunes filles, est armée d’un tempérament susceptible d’ébranler la superbe d’Urbain Grandier. Jeanne, Dame de haut lignage, entrée en religion par dépit amoureux, légèrement bossue et dotée d’une nature intense se laisse fasciner par les récits qui lui sont rapportés sur Urbain Grandier. A la mort de l’Aumônier de son couvent, elle demande à Urbain Grandier de le remplacer. Ce dernier refuse tout net. C’est Jean Mignon, neveu de trincant et ennemi juré d’Urbain Grandier, qui prend la place.

Ulcérée, dévorée de curiosité autant que d’humiliation, la Supérieure tombe malade. Ele se languit, elle a des visions. Elle prétend qu’un homme vient troubler ses nuits. L’hystérie est contagieuse… A leur tour, les mêmes troubles affectent les religieuses. Leur confesseur, Jean Mignon soupçonne Urbain Grandier d’être l’incube pertubateur.

L’Archevèque de Bordeaux ordonne des exorcismes et conclut à des fantasmes de femmes cloîtrées. Il conseille à Urbain Grandier de quitter la ville. Celui-ci se gausse et reste.
En 1632, la peste éclate à Loudun, 4000 personnes périront, soit un cinquième de la population. Urbain Grandier se dépense sans compter au chevet des malades et fait preuve d’un grand courage.
Le diable qui était resté coi quelques mois refait son apparition. Sœur Jeanne des Anges découvre dans le jardin un bouquet de roses, maléfiques comme chacun sait, qui exhalent un parfum qui la mettent dans des transes indescriptibles.

Richelieu dépêche à Loudun le Baron de Laubadermont. Les comptes rendus sont falsifiés. Certains témoins, outrés des procédés employés, doivent quitter la ville et sont remplacés par des sbires à la solde de l’accusation.
Au terme d’une parodie de procès, Urbain Grandier est convaincu de sorcellerie et condamné au bûcher. La haine de ses ennemis se manifestera jusque dans la préparation de la sentence. Laubardemont peaufinera cruellement toutes les étapes du supplice du condamné qui durera douze heures.

Un chirurgien fut chargé de lui raser tout le corps et de lui arracher les ongles et les sourcils. Il ne procéda qu’au rasage et confirma à Urbain le soutien de toute une partie de la population loudunaise.
Comme dans tout procès de sorcellerie, il faut arracher au supplicié des aveaux. Urbain Grandier continue de clamer son innocence. Laubardemont lui fait appliquer la Question et lui inflige des tortures innomables bien que traditionnelles pour l’époque.
Grandier a les jambes brisées. Il est épuisé mais ne cède pas. Plus tard, un moine vient vérifier s’il n’a pas de points insensibles et le pique horriblement. Il est frappé avec un crucifix par un autre moine sur le chemin menant au lieu de l’exécution.

Pendant toute cette journée, Urbain Grandier fait preuve d’un courage extraordinaire. Même s’il concède le caractère libertin de sa vie, il refuse d’avouer tout acte de sorcellerie, affirme sa foi et sa confiance en Dieu, ne se retourne jamais contre ses accusateurs et ses tortionnaires.
La grandeur dde son attitude émeut des milliers de personnes qui assistent à son éxécution. Précipité dans le feu, Urbain continue de diviser. Ses ennemis ont vu jaillir des flammes des monstres, créatures du diable, ses amis et la foule toute entière vit passer au dessus de la place un vol d’oiseaux blancs emportant avec eux l’âme d’Urbain Grandier vers le Paradis.

Texte : Alain Godineau

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>documents : BD de la Jeune Chambre Economique – BD de Loudun

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