Légende de Saint-Landaure
Par une belle journée deu printemps de 1228. un brillant cortège quittait le château de Curçay : ayant obtenu la soumission des seigneurs rebelles après deux bonnes semaines de laborieuses négociations dans les marais de la Dive, au lieudit la Charrière de Curçay, le jeune roi Louis IX. alors âgé de treize ans, et sa mère Blanche de Castille prenaient le chemin de leur bonne ville de Loudun, distante d’environ 2 lieues, d’où ils regagneraient Paris et le Louvre.
Presque à la même heure, à moins d’un quart de lieue de là, dans les bois de Ternay, à l’orée d’une clairière où cinq allées se joignaient. un jeune seigneur du nom de Humbert. arrivé à Curçay quinze jours plus tôt avec la suite royale, était pendu haut et court à la branche maîtresse d’un chêne par ordre du Prévôt du Roi, pour avoir fait subir des violences à lune des « filles de la Reine ».
Un seigneur vint à passer au moment où les deux amoureux étaient en position fort délicate; ce que voyant, et bien qu’elle fût consentante, la « Fille de la Reine », oubliant son amour pour ne penser qu’à sa réputation et à son avenir, se mit à crier et à appeler à l’aide comme si elle était victime de violences.
Appréhendé sur l’heure, Humbert, dès son retour au château de Curçay, fut déféré devant le Prévôt du roi qui, peu après, rendait sa sentence et condamnait le coupable à être pendu pour félonie envers la Reine.
Telle est la tragique et véridique histoire du jeune et beau Humbert dont l’imagination populaire allait faire ce « saint Lazare » qu’ignorent certes et l’Eglise et le Calendrier, mais qui fut néanmoins, pendant plusieurs siècles, l’objet d’une véritable vénération dans le sud du Loudunais.
Si l’histoire est muette sur ce qu’il advint après la pendaison. une solide tradition assure par contre que. dès le départ du cortège royale. le supplicié fut dépendu et ramené à la vie.
Malheureusement. quoique bel et bien vivant, Humbert, légalement et civilement mort, ne pouvait revendiquer ni sa fortune ni ses fiefs, ce qui explique. sans doute, qu’il ait rapidement quitté la région pour s’en aller quérir sur ses terres au moins de quoi assurer sa subsistance. avant que la nouvelle de son trépas ignominieux y soit connue. Mais son départ n’avait rien de définitif et, moins de trois années plus tard, il revenait sous le nom de Landaure et sous les traits d’un saint ermite et s’installait dans un souterrain tout proche du lieu où il avait été naguère pendu ; vivant en ascète. se nourrissant de plantes et de fruits sauvages.
Ce Landaure faisait preuve d’une telle pitié et d’un si grand esprit de pénitence que les gens du voisinage le vénéraient à l’égal d’un saint et venaient continuellement lui demander aide et conseils au petit oratoire qu’il avait bâti de ses mains presque à l’entrée de son souterrain ; après sa mort. sans consulter ni Rome, ni l’évêché, ni même les curés des paroisses proches, ils le canonisèrent purement et simplement et lui rendirent un véritable culte.
Ainsi la tradition. complétant l’Histoire, expliquerait la venue de Landaure en Loudunais et apporterait, du même coup, une conclusion somme toute assez plausible à la tragique aventure du jeune Humbert.